2009-01-06

Václav Havel sur les présidents

Amusant et intéressant souvenir de Václav Havel, ancien président tchécoslovaque puis tchèque, sur ses collègues, en commentaire d'un article du Chasse-Clou.

Mise à jour 2009-01-12 : je reproduis le texte ici, pour ne pas le perdre si le lien venait à être brisé :
« (…) Une de mes premières surprises, quand j’ai pris ma fonction (de président), a été que mes partenaires, que ce soit sur la scène politique nationale ou internationale, étaient des personnes comme les autres, nullement exceptionnelles, certaines même plus naïves, moins éduquées, moins polies que leurs concitoyens sans aucune fonction.
Les hommes politiques sont souvent ignorants : ils parlent surtout de ce qu’ils viennent d’apprendre, d’une source ou d’une autre. Ils sont jaloux les uns des autres, ils ne cessent de loucher du côté des photographes, ils se placent toujours dans leur angle de vue, tout en faisant semblant de s’y trouver par hasard.
Lorsqu’ils se retrouvent en grand nombre, par exemple aux divers sommets, les moins connus et les moins puissants font leur possible pour être aux côtés des plus connus et des plus puissants, pour qu’on les voie, chez eux, en train de discuter amicalement “avec des grands“. J’ai vu souvent les gens se bousculer, lors des réceptions, autour du président américain ou russe, tandis que d’autres présidents attendaient seuls, dans un coin de la salle, soit parce qu’ils ne connaissaient personne, ou bien encore parce qu’ils avaient un problème de langue pour communiquer, ou enfin parce qu’ils voulaient être seuls.
Il s’agit non seulement de gens comme vous et moi, mais ce qui joue un rôle énorme - probablement plus grand qu’il ne faudrait - ce sont leurs relations personnelles. Lorsqu’ils se trouvent sympathiques, lorsqu’ils ont un souvenir commun, (…) lorsqu’ils peuvent communiquer directement sans interprète, (…) voilà la situation idéale pour améliorer les relations entre les États! Parfois cela me rappelle le Moyen-âge, où les amitiés et les relations familiales entre les souverains pouvaient garantir la paix entre leurs pays, les conduire à une coopération, voire à l’intégration, tandis que la haine, la jalousie ou le souvenir de l’humiliation pouvaient les conduire à une confrontation militaire.
Je ne veux pas dire par là que je n’ai pas trouvé dans les hautes sphères politiques beaucoup de gens sympathiques, sages, courageux, cultivés, généreux et amusants, mais juste qu’ils ne sont pas nécessairement plus nombreux qu’ailleurs. »
Extrait des mémoires du pouvoir (2005) de Václav Havel
(source : commentaire d'un article du Chasse-Clou)

8 commentaires:

Rubin Sfadj a dit…

Ce commentaire lumineux méritait bien un lien ! Merci donc !

AsTeR a dit…

Très sympa !

deligne a dit…

Vaclav Havel, un type remarquable !!! Je n'oublierai jamais qu'il avait fait de F. Zappa sont ministre de la culture: "The Communist regime collapsed in Czechoslovakia in 1989, and Havel was elected president. He brought American rock musician Frank Zappa to Czechoslovakia and gave him a position in the ministry of culture."

Rubin Sfadj a dit…

Et en plus c'est un ami intime de Lou Reed. What's not to like?

deligne a dit…

Je conserve aussi une copie de son texte, qui pour moi décrit les politiques comme je les connais et comme je me les représente: un ramassis de bons à rien, sauf exception. Merci Libertas :-)

deligne a dit…

C'est parfaitement exact, Rubin!

Rubin Sfadj a dit…

@Scheiro : je vois que nous avons les mêmes références ;-)

deligne a dit…

C'est pour ça qu'on ne s'entend pas trop mal, toi et moi, Rubin ;-))