Bien que je ne prétende pas avoir fait une exégèse exhaustive du contenu et des commentaires, je suis allé me faire une idée des premiers adhérents de la cause de l'émoi du moment,
Renovatio Occidentalis, qui ont à première vue surtout des accents militaires, militaristes. Ceci n'est pas un avis complet et définitif, seulement une ébauche, mais je n'ai pas le temps d'en écrire davantage.
Mais compte tenu de l'ambiance, je tiens à dire que je reste membre du
réseau LHC. Pourquoi resté-je ?
Le fait que certains des membres aient adhéré à un autre réseau ne me semble avoir aucune incidence ni sur LHC, ni sur les valeurs de liberté, d'humanisme et d'esprit critique que ce réseau porte.
La liberté d'expression n'a aucune utilité si c'est pour ne rien se dire. Je ne peux débattre qu'avec quelqu'un dont l'avis diffère.
Je me reconnais dans LHC. Je ne me reconnais pas dans Renovatio Occidentalis : ce n'est pas mon combat. J'ai plus en commun avec un Arabe éclairé qu'avec un Français du NPA, avec un Indien d'Hyderabad ou d'Ahmedabad qu'avec un Schwarzer Block allemand, avec un Afghan de l'Alliance du Nord qu'avec un suprématiste américain, pour résumer rapidement. Les affinités intellectuelles choisies importent plus que les appartenances subies ; les cultures sont distinctes, la civilisation est une. Bien qu'étant de culture occidentale, je ne suis pas occidentaliste, parce que je suis un orientaliste, si j'ose cette juxtaposition : je sais trop de la richesse intellectuelle de l'Orient (au sens large) et de la pauvreté intellectuelle de la Bible Belt et du Midwest américain, pour illustrer ma pensée par des exemples, pour m'y retrouver.
Le libéralisme est un paradigme qui ne répond pas aux questions de fond, morales, éthiques, métaphysiques, philosophiques, ni même à toutes les questions politiques. Qu'est-ce que la vie bonne ? Le libéralisme offre la liberté de choisir, il peut aider à discerner quelles actions sont mauvaises, mais il ne suffit pas à dire ce qui est bon. Il laisse entière la question du sens. Depuis son émergence en réponse aux guerres fanatiques (avec
La Boétie et son
Discours de la servitude volontaire), il permet la coexistence pacifique d'opinions divergentes.
Je pense que Renovatio Occidentalis est une tentative maladroite de redire un attachement - que je partage - à l'unité de nations qui ont la chance de connaître la démocratie libérale, le respect de la vie, de la liberté et de la propriété, l'égalité des droits, la responsabilité, la fraternité volontaire, unité que "l'obsession anti-américaine" dénoncée par le regretté
Jean-François Revel met à mal.
Je me retrouve assez dans les commentaires de Paul de
Freelance sur le billet d'
Avec nos gueules: "Je trouve que vous vous enflammez un peu vite. Les masques ne tombent pas, ils étaient déjà à terre depuis longtemps pour qui sait lire.
Criticus n'a jamais caché qu'il était un "néo-conservateur", il le crie même sur tous les toits. De plus, vous y allez un peu fort. Par exemple, vous utilisez X fois le mot xénophobie alors que dans sa charte il précise au point 2 : "Les membres de Renovatio Occidentalis se refusent à tout racisme et à toute xénophobie". Je ne dis pas que mettre ça dans sa charte protège de tout procès, mais quand même, vous pourriez argumenter au lieu de prendre pour acquis "occident = extrême-droite = raciste = nazi" et point barre. Bref, je trouve vos propos un peu trop virulents. J'ai du mal à reconnaître par exemple Lomig dans le portrait que vous faites de ce blog comme d'une association néo-nazie. Ça sent le gauchisme de base..."
Les mauvais coups des polémiques ne sont pas absents de celle-ci. Les amalgames (je ne trouve pas dans la charte ce qui n'y est pas écrit), les faux syllogismes (il y a dans LHC quelques personnes qui professent un attachement marqué à un Occident imaginaire qu'ils ont en commun avec des gens qui ont un attachement à l'armée en commun avec des nationalistes, donc LHC est un repaire d'extrémistes !), des anathèmes (ceux qui ne ne sont pas avec moi sont contre moi, et comme je suis antifasciste, ce sont des fascistes, quand bien même ce procédé, grossier, me paraît d'essence fasciste), les allusions douteuses (le symbole de l'OTAN rapproché de la croix de fer allemande... qui fut en usage à l'époque nazie... mais exista avant... et après, puisqu'elle reste le symbole de la Bundeswehr), les attaques ad hominem. En face, je trouve la menace de Criticus de balancer les noms de personnes qui ont choisi l'anonymat scandaleuse et probablement illégale.
Le faux syllogisme : des sympathisants d'extrême-droite sont occidentalistes, Criticus est occidentaliste, Criticus est membre de LHC donc je quitte LHC à cause de la proximité de LHC avec l'extrême-droite, me laisse pantois. C'est un peu comme si je refusais de siéger au Parlement européen parce que Jean-Marie Le Pen en est membre. Je considère LHC comme un lieu de débat entre personnes attachées à la démocratie libérale, non comme un pôle de rassemblement identitaire. Comme
Lomig, je ne pense pas que les appartenances soient exclusives ;
Amin Maalouf, qui vient du Liban, sur la ligne de faille entre l'Occident et l'Orient, en sait quelque chose et l'a écrit dans son excellent livre
Les identités meurtrières. Les identités meurtrières.
Comme
Toréador, je pense que le concept non d'Occident mais d'occidentalisme est incohérent. Et cette incohérence le voue plus à la marginalité qu'aux gémonies. Il faut dire qu'en tant que libéral français, je n'ai guère de leçons de marginalité à donner : la marginalité, en France, le libéralisme connaît.
Je ne crois pas aux prémisses de Renovatio Occidentalis : non, l'Occident n'est pas décadent ; sa situation n'était pas meilleure au 20e siècle aux idéologies communiste et nationale-socialiste criminelles, au 19e siècle qui mena à 1914, au 18e siècle qui mena à 1789 et 1793, au 17e siècle de l'absolutisme monarchique, au 16e siècle des guerres religieuses. Il mute, il change, il évolue, non sans douleurs. Il est perfectible, il n'est pas décadent. Je ne partage pas non plus le syndrome obsidional : il n'est pas moins menacé par lui-même que par l'extérieur. Je ne comprends pas non plus la définition géographique de l'Occident : que font ses défenseurs des zones grises ? Dedans ? Dehors ?
Au total, libéral je suis, occidentaliste ne puis.
Pour conclure, oh surprise ! je ne suis pas néo-conservateur, je suis libéral, je me reconnais dans LHC, je ne me reconnais pas dans Renovatio Occidentalis. Libéral, je peux parler avec des néo-conservateurs, comme avec des conservateurs, comme avec des socialistes, car parler à son nombril trouve vite ses limites.
J'espère que Lomig, à la réflexion, se rapprochera de mon point de vue, et que cela permettra à
Rubin de revenir à LHC. Il me manque.
Correction : Je modifie la première phrase : il manquait en effet un maillon du raisonnement ; j'avais pointé à tort vers une page d'un blog,
Théâtre des opérations, qui n'était
pas membre de Renovatio Occidentalis, parce qu'elle expliquait une image reprise en commun sur plusieurs des blogs de Renovatio Occidentalis :
Jeune droite,
Rebelles.info, par exemple, reprennent l'image : "Soldat, nous ne t'oublions pas". Cela illustrait, trop rapidement, mon propos, qui était que ce qui me sautait le plus aux yeux lorsque j'ai parcouru les blogs de RO était surtout leur côté militaire et/ou militariste. Je corrige le raccourci erroné.
Je précise que je ne fais pas l'amalgame, que d'autres ont tôt fait de faire, entre intérêt pour les questions de défense et nationalisme. Il existe de nombreuses variantes de libéralisme, mais souvent les libéraux assignent à l'État quatre fonctions: police, justice, diplomatie et défense, afin d'assurer le respect des engagements conventionnels. Ce que les libéraux contestent, c'est l'extension des prérogatives de l'Etat en dehors de ces quatres fonctions régaliennes.